exposition arrêt sur... europe carolingienne une renaissance • l'éducation • le palais • des foyers culturels religion et politique l'art du livre les usages du livre l'héritage gros plans livres à feuilleter pages à la loupe repères fiches pédagogiques informations publication © Le palais, cœur de l'empire L'amélioration de la gestion du royaume héritée des rois mérovingiens est un but important pour Pépin le Bref, qui s'inspire du modèle italien. Les officiers qui l'entourent sont des laïcs, le plus souvent membres de l'aristocratie franque, mais les responsables de l'administration royale sont maintenant des clercs. Ils jouent le premier rôle dans la longue réforme religieuse et administrative qui commence alors et se traduit par un nombre d'actes en constante augmentation. S'il existe une véritable école dans le palais du souverain, elle est réservée à cette époque aux jeunes clercs qui apprennent leur métier dans la chapelle ou dans la chancellerie. Au VIII e siècle, les rois ont encore une vie itinérante. En s'installant à Aix-la-Chapelle à partir de 790 et en y construisant une résidence digne de ses ambitions, Charlemagne est le premier à réunir son entourage dans un lieu fixe, connu sous l'appellation de palais. L'organisation du palais et son protocole sont calqués sur la cour de l'empereur romain Constantin (314-340). Les membres de la famille impériale sont au centre d'une organisation complexe, constituée d'officiers de haut rang, le chapelain et l'archichancelier, et d'autres fonctionnaires comme le chambrier, charge occupée sous Charles le Chauve par le comte Vivien. Les responsables de l'empire y font de nombreuses visites, la cour est au cœur d'échanges diplomatiques nourris et, après le couronnement à Rome, un prestige international s'ajoute à son éclat. Louis le Pieux maintient le siège de son gouvernement à Aix-la-Chapelle. De même, après le partage de 843, quand Charles le Chauve choisit Compiègne parmi d'autres résidences et Louis le Germanique Francfort ou Ratisbonne, la ville élue par leur grand-père reste un enjeu politique important. Les écoles du Palais C'est autour de la Cour de Charlemagne et de celle de Charles le Chauve que se constituent les deux écoles du Palais carolingiennes où se développent les arts. Elles dépendent étroitement du mécénat des deux princes, et ne survivent pas à leur disparition. L'école de Charlemagne La première école palatine, localisée à Aix-la-Chapelle, se développe à la fin du VIII e et au début du IX e siècle sous l'impulsion de Charlemagne ; elle marque le début d'une ère nouvelle dans tous les domaines. Les architectes qui participent à la construction et à l'ornementation des bâtiments y côtoient les calligraphes et les peintres qui produisent des manuscrits de grand luxe, destinés pour partie à la chapelle impériale. La cour s'installe définitivement à Aix-la-Chapelle en 795, dans un ensemble architectural qui restera la plus importante réalisation civile dans le royaume. L'empereur accueille volontiers dans son palais les écrivains et les intellectuels, qu'il fait travailler pour lui. Charlemagne est plein de vénération pour ceux qui enseignent, les comble d'honneurs et se fait leur élève. Il apprend la grammaire avec Paulin de Pise, la rhétorique, la dialectique et l'astronomie avec Alcuin. Rencontré en Italie, celui-ci est sans doute le conseiller le plus proche et le plus écouté, comme en font foi des lettres au ton et au contenu très personnels. D'après Éginhard, l'empereur encourage des leçons, des débats entre intellectuels et aristocrates, des jeux littéraires, auxquels assistent les enfants de la famille royale et ceux des aristocrates qui vivent à la cour. Une vie brillante réunit les lettrés, membres de cette sorte de salon qu'est l'Académie palatine, où la poésie, très appréciée par le souverain, est à l'honneur. Ses membres surnomment Charlemagne David, et se donnent des pseudonymes à consonance antique : comme Théodulfe le rapporte dans un poème, Alcuin est Flaccus, Angilbert Homère, et Éginhard Nardulus. En matière de production de manuscrits, l'école s'illustre à travers l'exécution d'Évangiles de très haute qualité, enluminés dans un style où dominent les influences de l'Antiquité tardive. De cette école sont issus en particulier les Évangiles du groupe d'Ada, du nom d'une abbesse de l'entourage de Charlemagne, et les fameux Évangiles du Couronnement, dont les illustrations sont réalisées dans un style illusionniste ancré dans la tradition hellénique. Tous ces manuscrits témoignent de la richesse d'inspiration de leurs auteurs, comme du souci de perpétuer les conceptions artistiques de la culture grecque et romaine. La hiérarchie savante dans l'utilisation de la pourpre et des écritures d'or et d'argent, le luxe des peintures à pleine page et des lettres ornées, la variété infinie des encadrements, témoignent du niveau des moyens qui leur sont dédiés. Ce centre est vraisemblablement dirigé dans les premières années par Godescalc. Son activité diminue peu à peu pour cesser vers 810, mais son style va marquer la production livresque de la partie orientale de l'empire franc pour longtemps. Témoin et acteur d'une évolution inéluctable qui a commencé avant lui, Charlemagne entretient donc à ses côtés une sorte de laboratoire. Là est le berceau de la renaissance culturelle et artistique qui caractérise l'époque carolingienne. La mort de Charlemagne met un terme à l'activité artistique de l'atelier impérial d'Aix, mais de Louis le Pieux à Charles le Chauve, malgré leurs insuffisances et leurs dissensions, ses successeurs continueront la politique de leur aïeul. L'école de Charles le Chauve Sous le règne de Louis le Pieux, la qualité des réalisations d'ouvrages liturgiques connaît une baisse sensible, mais ses fils, Louis le Germanique, Lothaire I er et Charles le Chauve, renouent avec la tradition des volumes de luxe, commandes impériales ou dons de leur entourage. Charles le Chauve, en effet, aime le luxe. En témoigne une lettre de 840-841, où Loup de Ferrières demande au chancelier de l'empereur que deux de ses serviteurs soient instruits dans l'art de travailler l'or et l'argent par les orfèvres de la Cour : " La renommée a répandu partout que vous en possédiez de très habiles ". Durant la seconde moitié du IX e siècle, l'empereur s'engage donc sur les traces de son illustre grand-père en encourageant les arts, en particulier dans les domaines du livre et de l'orfèvrerie. Son nom est ainsi associé à plusieurs manuscrits particulièrement luxueux, tels le Codex Aureus , son psautier et son livre de prières. Ces deux derniers manuscrits sont signés par le scribe Liuthard, qui dirige probablement l'école de Charles le Chauve et qui donne son nom à un ensemble de pièces d'ivoire également produites dans son entourage. Cette école du Palais, dont la localisation demeure inconnue, se situe au point de rencontre des grands courants artistiques des décennies précédentes, empruntant la plupart de ses traits stylistiques aussi bien à Metz qu'à Reims et à Tours. La production livresque de son école palatine mêle harmonieusement les aspects novateurs des grands scriptoria francs, l'originalité iconographique de Metz et la puissante interprétation des modèles antiques pratiquée à Reims ou à Tours, avec les héritages italien et insulaire. Cet atelier est composé de scribes, de peintres, mais aussi de sculpteurs sur ivoire et d'orfèvres ; des thèmes et des modèles semblables traversent les différentes techniques mises en œuvre pour la fabrication des livres. Les peintres et les calligraphes suivent au gré des événements les pérégrinations de la cour entre les résidences royales de Soissons, Saint-Denis, Ponthion, et surtout de Compiègne où l'empereur inaugure en 877 une chapelle à l'image de celle d'Aix, symbole de la nostalgie pour une époque déjà révolue. L'art carolingien atteint alors un aboutissement éblouissant qui va fortement influencer les siècles suivants.